Partir en voyage seule : le témoignage de Domi
J’ai rencontré Domi en avril 2021, pendant la saison de picking de kiwi près de Te Puke, où nous sommes par la suite devenues colocataire, partageant chambre, conversations sérieuses et moins sérieuses, ainsi qu’une passion commune pour la plongée ! Elle a osé partir en voyage seule, il y a 7 ans déjà. Son parcours atypique m’a impressionnée, ses réflexions m’ont inspirées… encore une rencontre qui m’a touchée et que je souhaite vous partager !
Bonjour !
Moi c’est Domitille (alias Domi), j’ai 30 ans, je viens de Rambouillet, une petite ville près de Paris connue pour sa forêt. Les parisiens y vont pour prendre l’air, moi j’allais à Paris pour polluer mes poumons et étudier. J’ai fait 1 an de fac de littérature anglaise puis j’ai changé pour un BTS tourisme, obtenu en 2013. Les stages que j’y ai fait ne m’ont pas fait rêver d’une carrière dans un bureau… j’ai préféré mon expérience avec le Cirque du Soleil !
Raconte-nous !! 😀
Un spectacle est resté 2 mois à Paris, ils cherchaient des placiers, j’ai donc travaillé 2 mois avec eux. J’ai rencontré des gens d’un peu partout dans le monde qui m’ont donné l’idée de suivre le cirque à plus long terme. Mais je n’ai pas osé tout de suite ! Après Paris ils allaient à Munich, et je ne parlais pas assez couramment allemand pour me sentir à l’aise pour y travailler. Je ne les ai donc pas suivis, je suis restée en France. J’avais pour projet de reprendre des études, en école de cinéma, mais quand j’ai vu le prix des écoles privées je me suis dit que j’allais plutôt chercher un boulot alimentaire et faire du cinéma à coté ! Pendant cette période j’ai donc écrit et réalisé des courts métrages avec des amis tout en travaillant dans un magasin bio.
L’idée du cirque a doucement germée en moi et j’ai toujours été intéressée par le voyage, j’avais passé plusieurs étés en Espagne, à rencontrer plein de voyageurs, ça me manquait ! Je me suis alors dit « il faut que je bouge ». Je suis restée 1 an de plus en France, et fin 2014 j’ai décidé de partir en voyage en Australie !
Pourquoi cette destination ?
J’hésitais entre le Canada et l’Australie, mais j’ai vu que le Cirque du Soleil faisait une tournée en Australie, je me suis donc dit que ça pouvait être parfait de voyager et de travailler avec eux en même temps.
J’ai postulé depuis la France, mais il voulait me voir sur place avant de me donner un poste. J’ai pris le risque de partir sans certitude, mais j’avais suffisamment confiance en moi pour tenter. Si ça ne marchait pas et bien ça aurait simplement été une autre aventure !
Ils m’ont prise ! Je suis donc restée 8 mois en Australie avec un Working Holiday Visa (= PVT) d’un an. Puis j’ai décidé de rentrer. L’Europe me manquait, un nouveau spectacle du Cirque tournait là-bas (et démarrait à Paris), des amis y participaient… je me suis dit je tente ! Je suis restée avec cette tournée européenne pendant 3 ans, pendant lesquels j’ai eu quelques mois de pause pour me ressourcer en France, voir la famille… Puis enchainée sur une autre. J’ai donc en tout fait 5 ans en Europe de tournée avec le Cirque du Soleil, avec différent spectacles. J’ai varié un peu les postes, mais j’ai principalement été responsable adjointe du chef de salle. A côté j’avais le temps de visiter.
J’attendais l’opportunité d’évoluer mais ça ne venait pas, alors j’ai fini par arrêter. Je voulais sortir de cette « bulle », au cirque on est un peu isolé du monde réel.
Je souhaitais alors de nouvelles expériences tout en continuant de voyager. J’ai repris des études en ligne pour être professeur de français langue étrangère, me donnant la possibilité de travailler dans n’importe quel pays. Je l’ai validé l’année dernière en Nouvelle Zélande.
En parlant de Nouvelle-Zélande, comment es-tu arrivée jusqu’ici ?
Après l’Australie je voulais partir en voyage en Nouvelle Zélande. Mais du fait de l’opportunité du Cirque en Europe, j’ai changé mes plans. C’était tout de même resté dans un coin de ma tête !
Lorsque j’ai rompu mon contrat avec le Cirque du Soleil 5 ans plus tard, je suis restée 6 mois en France. J’étais alors réceptionniste dans un studio d’animation, mais les horaires de bureau et la vie parisienne métro/boulot/dodo m’ont vite poussé à m’en aller. J’ai ressenti le besoin de voyager à nouveau, j’ai donc postulé pour le PVT néo-zélandais !
J’ai décollé en janvier 2020 pour 3 semaines au Cambodge, puis début février à Christchurch en Nouvelle Zélande, avec 2 amies françaises.
J’y suis restée 1 semaine pour acheter la voiture et faire la paperasse (compte bancaire etc). C’était l’été, alors j’ai commencé par 1 mois et demi de roadtrip dans l’Ile du Sud, avant que le confinement ne soit annoncé (mars 2020). J’étais alors sur la West Coast en voiture. A Christurch nous nous étions liés d’amitié avec le propriétaire du logement où nous étions restés, ils nous a proposé de venir chez lui, j’ai passé le confinement là-bas. Par rapport à beaucoup d’autres français qui ont galéré (un exemple avec le témoignage de Carla), je me rends compte que moi j’ai eu beaucoup de chance, j’étais avec mes meilleurs amies et un kiwi le plus sympa au monde ! Mes cours en ligne occupaient mes matinées et je chillais avec mes amis l’après-midi, c’est de bons souvenirs (surtout les nombreux apéros ! 😀 )
Quand on a été libre, j’ai fini le tour de l’Ile du sud avec une des deux amies (l’autre étant rentrée en France entre temps) pendant 1 mois, avant de prendre le ferry pour Wellington avec l’idée d’y trouver du travail pour l’hiver (juin 2020). J’ai trouvé au bout de 3 jours un hôtel qui avait besoin soudainement de monde, beaucoup d’employés étant partis pendant le confinement). J’ai travaillé au restaurant et au bar de cet hôtel 3 mois. Puis j’ai voulu chercher une ambiance et des collègues qui me correspondaient mieux. J’ai postulé dans un cinéma retro, avec des employés de mon âge. Je n’ai pas du tout regretté mon choix ! C’était bien mieux, j’y ai passé 3 mois. C’était une ambiance familiale qui ressemblait à mon expérience du cirque.
Fin janvier 2021 je suis repartie en vadrouille (c’était l’été !) pour visiter l’Ile du Nord par moi-même. Au bout de 2 semaines la solitude me pesait, je me suis arrêtée à Taupo pour 1 semaine de bénévolat dans un centre de retraite spirituelle. Finalement constatant que l’argent partait plus vite que prévu, plutôt que d’aller directement dans le Northland, j’ai décidé de m’arrêter faire la saison des kiwis à Te Puke. J’y ai rencontré tout un groupe de backpackers (dont toi !), c’était une première pour moi ! En effet jusqu’ici j’avais vécu qu’avec des locaux, j’avais toujours évité autant que possible les backpackers, pour m’immerger au maximum dans la culture locale. Mais finalement ça ma agréablement surprise, j’ai apprécié !
Beaucoup de backpackers tentent effectivement l’expérience du picking de kiwi pendant leur PVT, toi qu’en as-tu pensé ?
Je me souviens des premiers jours et même premières semaines où je me demandais constamment ce que je faisais ici. C’était dur physiquement. Je ne me voyais pas tenir. Mais j’ai tenu, pour me prouver à moi-même que j’étais forte ! Puis finalement il y a eu des belles semaines, où je me faisais pas mal d’argent, avec des personnes sympas. Je sais que je rechercherais quelque chose de similaire pour rencontrer des gens, sur le côté humain faire une saison c’était une bonne expérience. Mais pas le picking de kiwi. Avec le recul je ne regrette pas du tout, mais je ne le ferais pas une deuxième fois. Tu tiens parce que tu sais que c’est temporaire, mais c’est répétitif et très dur mentalement, ton cerveau se transforme en jus de kiwi ! (rires)
Quels sont tes projets pour la suite ?
Avec le prolongement de visa, je compte retourner quelques mois à Wellington pour l’hiver et y donner des cours de français, via l’Alliance Française. Je suis à la fois pressée et un peu stressée !
Je te souhaite de la réussite ! Et après la Nouvelle-Zélande, qu’aimerais-tu faire ?
C’est la grande question ! Une partie de moi évite la France pour des raisons… Comment dire… En fait j’ai peur de retrouver un pays que je ne reconnais pas. Et puis retourner en France pour moi ça veut dire retourner à la vie réelle et avoir un « projet de vie » et j’ai encore envie d’éviter quelques temps de faire face à ces problèmes-là. Je crois que j’ai le syndrome de Peter Pan, je ne veux pas grandir !
Pour toi ce n’est pas la vie réelle ici ?
Ici on vit réellement, on apprend beaucoup même. Mais en France on est en face de gens qui ne sont pas partis, on est confronté à ce que la société nous impose et je ne suis pas prête pour ça. Je me sens plus libre ici. Mais la famille me manque, j’ai des raisons de rentrer… Ce n’est pas évident comme choix !
Je réfléchis à aller au Canada ou en Amérique du Sud, selon l’évolution de la crise sanitaire. Mais au final ce sera toujours des gens qui te feront rester à un endroit ou pas Ce n’est pas prévisible à l’avance !
Tu n’as jamais eu peur de partir en voyage si loin seule ?
Ça peut faire très peur d’aller aussi loin quand c’est ton 1er voyage, mais moi j’ai fait des pas de bébés au départ (l’Espagne en solitaire mais toujours dans des situations pour rencontrer des gens via par exemple des cours de langue). J’y suis allée doucement avant de partir en voyage en Australie !
A chaque départ on se pose toujours beaucoup de questions, c’est normal. Mais comme on est passé par là avant, on sait que ça s’est bien passé et que ça va aller. L’avantage de voyager seul, c’est que tu peux te mettre dans des situations de rencontre, tu es plus ouvert pour en faire que quand tu le fais avec quelqu’un.
Maitrisais-tu l’anglais avant d’arriver ?
Avec mon expérience au Cirque du soleil et l’Australie j’avais de bonnes bases en anglais. En Nouvelle-Zélande la motivation n’était donc pour moi pas d’apprendre l’anglais, mais de l’utiliser. J’ai énormément progressé en pratiquant au quotidien avec des gens. Je me souviens quand je suis arrivée en Australie, je croyais parler anglais, mais j’ai découvert l’accent ! Il y a toujours un temps d’adaptation. Pareil quand j’ai travaillé à Wellington, il y a eu beaucoup de moment où je me sentais « trop française » j’avais du mal à comprendre l’accent, il y avait encore du travail ! Mais c’était un très bon challenge ! Toutes mes expériences de changement de pays avec le Cirque m’ont apprise à m’adapter facilement à ces situations.
Penses-tu avoir changée depuis ton départ ? Qu’est-ce que toute cette expérience t’a apporté ?
Ouais. Des bras plus musclés qu’en début de saison et quelques rides ! (rires) J’ai pris un peu plus confiance en moi. Ce n’est que mon avis mais je ne pense pas qu’il faut attendre du voyage un gros changement radical (sinon on peut être déçu) mais comme c’est un long processus et que les changements sont à petites échelles, à force ça a un impact important sur ta vie. En Australie j’étais partie pour un an, en pensant revenir avec un projet de vie !
Parmi tous tes voyages, quel est ton meilleur souvenir ?
Voir les aurores boréales en Islande ! Une claque visuelle !! Ainsi que les planctons bioluminescents à Puerto Rico (pendant mes vacances entre 2 tournées) !
En Nouvelle Zélande de nombreuses randonnées de l’Ile du Sud m’ont vraiment fait apprécier le pays. C’était encore mieux que les photos qu’on a l’habitude de voir partout !
Mais pour moi une expérience de paysage reste très liée avec qui tu es, avec quelle humeur… Ce qui fait que c’est assez subjectif, difficile d’en choisir une ! Par exemple la randonnée du Mont Arthur : très belle randonnée, mais on a trouvé notre pneu crevé au retour, avec la fatigue, la nuit… ça gâche vraiment le moment. Pour autant ça nous a permis de rencontrer des gens qui nous ont aidé, on a partagé du vin avec eux…
Et ta plus belle rencontre justement ?
Le gars du airbnb à Christurch est le 1er kiwi que j’ai rencontré. Il a le cœur sur la main, il n’attend rien en retour. Tout ce qu’il fait c’est pour partager quelque chose. Une amitié très rapide et naturelle s’est établie. Même si on ne se voit plus, de part le voyage, il restera un ami. Cette rencontre a beaucoup changé mes projets de voyage, en positif !
J’ai aussi apprécié la colocation de Poo’kehina (petit jeu de mot entre « Pukehina », le nom du village et « Poo » qui signifie 💩 en anglais…) où on a vécu ensemble. Le fait de me retrouver avec un groupe de personnes qui n’était pas forcément proche au départ, mais avec un instinct inconscient de savoir que ça allait fonctionner naturellement (même vision sur des points importants, tout en appréciant les différences de chacun). Un bon mélange de personnalité et de culture !
Quelle a été ta pire galère ?
J’ai eu une petite période de déprime à Wellington, mal du pays, perdue dans mes projets de vie… Après un certain temps j’ai réussi à me secouer et faire des activités qui m’ont sortie de cette impasse, j’ai rencontré des gens qui m’ont fait relativiser et voir les choses différemment !
Est-ce que ça va maintenant ? Es-tu heureuse aujourd’hui ?
Doucement j’apprends de plus en plus à savoir ce que je veux, mais c’est quelque chose sur lequel on travaille dessus même quand on devient plus vieux !
Là, en période de transition (fin de saison, nouveau boulot) je stresse et me pose beaucoup de questions (projet de vie etc). Mais je reconnais que j’ai déjà vécu des périodes comme ça, je sais qu’il faut que je m’accroche et que ça ira mieux après. C’est en vivant des galères que tu peux les reconnaitre et en sortir, merci les voyages !
Comment peut-on suivre tes aventures ?
Je ne suis pas très réseaux sociaux mais j’ai comme projet de faire des montages vidéos via ma Go Pro. Projet à suivre !
Merci beaucoup Domi !
Une question pour l’une de nous, ou une remarque ? N’hésite pas à laisser un commentaire ! Tu peux partager le lien du blog ou de cet article s’il t’a plu, et montrer que oui partir seul en voyage est possible 😉 A bientôt pour un prochain témoignage !
Bravo les filles!!! Vous avez raison de vivre vos envies et vos rêves … même s’il faut toujours en garder quelques uns dans la catégorie « à réaliser » pour garder un but, une ligne de mire… et surtout ne pas avoir de remords, même si quelques regrets nous poussent à faire « mieux la prochaine fois! »
Par exemple: je ne serai jamais « Médecins Sans Frontières » mais j’ai une famille formidable avec 4 magnifiques enfants! 🥰🥰🥰
Ou bien: je ne serai jamais « chauffeur-routier international » ( Max Meynier et « les routiers sont sympas » sur RTL ont alimenté mes premières parties de nuit de la période collège, dès que j’ai eu un radio-réveil pour la communion jusqu’à l’internat du lycée…) mais… je voyage beaucoup en France comme à l’étranger et sous diverses formes ( en tractant la caravane, je suis un peu routière ! Lol) et en faisant de superbes rencontres, … alors que d’autres préfèrent la sécurité d’une résidence secondaire…
Alors bravo et n’oubliez pas que l’on peut renvoyer l’image d’une vie bien rangée qui ne le soit pas vraiment!😄😅😍… même si des vacances tranquilles, c’est bien aussi, des fois!
Une grosse bise à ma fille adorée 🥰😘🥰
Super témoignage !!! En attente du prochain avec impatience 🤗